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Guinée : le retrait massif de permis miniers, entre réforme nécessaire et risques économiques

Guinée : le retrait massif de permis miniers, entre réforme nécessaire et risques économiques

Le gouvernement guinéen a récemment procédé au retrait de plusieurs dizaines de permis miniers pour cause d’inactivité. Une décision qui s’inscrit dans une volonté affichée de reprendre le contrôle sur les ressources du pays. Si cet acte peut être vu comme une affirmation légitime de souveraineté, il soulève également de nombreuses questions sur la gouvernance du secteur et l’attractivité de la Guinée pour les investisseurs.

Un signal fort… mais à double tranchant
Retirer des permis non exploités peut paraître logique sur le plan économique. Mais lorsque ces retraits sont perçus comme brusques ou insuffisamment justifiés, ils peuvent semer le doute chez les investisseurs.

Une question de transparence
L’un des principaux points d’interrogation porte sur les critères ayant conduit au retrait. En l’absence d’une communication claire sur les règles appliquées, certains acteurs évoquent une démarche arbitraire.
Les effets immédiats ne sont pas négligeables : ralentissement de projets, perturbation des chaînes d’approvisionnement locales, tensions sociales dans certaines zones minières.

Analyse : entre mesures correctrices et besoins structurels
1. Un fondement technique légitime
Il est normal de retirer les permis à ceux qui ne respectent pas leurs engagements : pas de travaux, pas de plans, pas d’exploitation. Cela nuit à l’économie nationale.

2. Une faiblesse dans la gestion du cadastre
Un retrait massif indique que les outils de suivi étaient défaillants. Une bonne gestion minière permettrait de détecter les blocages en amont.

3. L’effet dissuasif sur les opérateurs sérieux
Sans procédure rigoureuse et graduelle (mise en demeure, suspension, retrait), cela risque de décourager les entreprises sérieuses.

4. Valoriser les zones récupérées
L’État doit transformer ces retraits en opportunité : appels d’offres transparents, infrastructures, attractivité des projets.

5. Une opportunité pour refonder le secteur
Cela doit s’accompagner de :

la modernisation du code minier,

la digitalisation du cadastre,

le renforcement des capacités techniques,

la création d’un climat propice à l’investissement responsable.

C’est une mesure forte, mais elle appelle à une rigueur accrue dans l’attribution, le suivi et l’évaluation des permis. Le sous-sol guinéen est riche, mais sans discipline  transparence, ce potentiel ne profitera ni à l’État ni aux peuples.
La décision du gouvernement est audacieuse et potentiellement bénéfique. Mais pour qu’elle produise des effets positifs durables, elle doit s’inscrire dans une stratégie globale de réforme, fondée sur un cadre juridique stable, un processus de réattribution clair et un dialogue constant avec les acteurs du secteur. Sinon, elle risque de produire l’effet inverse : une perte de confiance durable dans le climat des affaires guinéennes. 

Par Abdoul Bachir Sylla – Journaliste spécialisé en gestion d'entreprise.